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Le Plan de Mobilité élaboré par Nîmes Métropole est-il à la hauteur des défis environnementaux ?

Nîmes Métropole vient d’arrêter en novembre 2023 son Plan de Mobilité (PDM). Ce document qui précise l’organisation du transport de personnes et de marchandises, la circulation et le stationnement pour les dix ans à venir. Il doit permettre de répondre aux besoins de mobilité de chacun, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre, la pollution de l’air, le bruit et les dégradations de la biodiversité.

Il doit encore faire l’objet d’une consultation de personnes publiques et d’une enquête publique avant d’être définitivement validé.

Nous avons demandé à deux experts, M. Trécomplet et Mme Jédédoutes, de partager avec nous leurs avis à la lecture de ce copieux document de 193 pages.

M. Trécomplet :

Les objectifs de ce plan me semblent très ambitieux et je pense qu’il était indispensable qu’ils le soient.

Une enquête de 2015 a montré que dans notre agglomération, « 64% des déplacements se font en voiture, 27% à pied, 7% en transport en commun, et 2% en deux roues (vélo, deux-roues motorisés) »

Ce plan vise à réduire la place de la voiture en la faisant passer de 64% à 50% des déplacements.

C’est un changement considérable dans le fonctionnement quotidien de notre ville. Pour y parvenir les transports en commun devront atteindre 11% des déplacements et la part des deux roues devra bondir jusqu’à 9% des déplacements.

Mme Jédédoutes :

Ce plan est moins ambitieux cependant que le Plan de déplacements urbains adopté en 2007. Il prévoyait pour 2025 une part plus importante de mobilité à vélo, loin d’être atteinte aujourd’hui. Il visait une nette augmentation des transports en commun, alors qu’elle est restée très modérée.

Certes, aucun élu du conseil communautaire n’a voté contre ce projet, mais la question est de savoir si le Plan pourra être mis en œuvre dans un laps de temps aussi court.

Ne pensez-vous pas que les débats autour de la baisse du budget de la nouvelle délégation de service public pour le réseau Tango envoient un message contraire à cette ambition ?

Peut-on espérer accroître la part des transports en commun sans garantir une amélioration sensible de la qualité du service offert ?

M. Trécomplet :

Je conviens que seul un programme d’actions très complet peut permettre de réussir le challenge que représentent ces objectifs.

Or c’est bien ce que propose ce plan. Il se décompose en 24 actions répartis sur 7 axes.

Je vais prendre quelques exemples : dans le Plan Vélo, 163 km d’itinéraires cyclables sont inscrits (hors véloroute) au sein du territoire à l’horizon 2035 ; les services de prêt et de location de vélos vont être renforcés ; des zones de circulation apaisée seront mises en place dans de nombreuses communes de l’agglomération ; le réseau ferré existant va permettre d’organiser un véritable réseau de RER métropolitain ; des aménagements de sites propres pour les bus seront poursuivis sur les axes structurants.

Mme Jédédoutes :

Beaucoup d’actions vont en effet dans le bon sens. Mais il est dommage que ce plan ne hiérarchise pas ses priorités. Chaque action se décline en différentes sous-actions à conduire avec différents partenaires dont les priorités ne seront pas nécessairement identiques à celles de Nîmes Métropole.

Et puis, restons prudents : le Plan de 2007 prévoyait pour 2015 la réalisation de la Rocade Nord, bouclée de la route d’Alès (RN106) à route d’Avignon (RD6086), ou pour 2025 la réalisation du Contournement Ouest, la mise à 2 x 2 voies de la RN 113 … Les priorités peuvent changer !

Les actions qui ont le plus de chance d’aboutir sont celles qui dépendent de l’agglomération seule et celles qui s’inscrivent dans des plans déjà élaborés par d’autres collectivités (Europe, Etat, Région, Département).

La mise ne place de zones 30 dans les quartiers de garrigue demandée par les comités de quartier en fait partie. De même, le renouvellement des bus qui repose sur la seule agglomération joue un rôle important pour l’attractivité des transports en commun.

Il aurait été intéressant que chaque action fasse l’objet d’une évaluation préalable de sa contribution à l’objectif d’évolution du trafic affiché. Cela permettrait de cibler en priorité celles qui ont le plus d’effets attendus.

M. Trécomplet :

Je suis bien d’accord avec vous sur le fait que beaucoup d’actions reposent sur la convergence de décisions de différents partenaires. C’est pour cela que Nîmes Métropole a pris soin de mettre en place une gouvernance partenariale, c’est-à-dire des instances de concertation pour animer la mise en œuvre de ce plan. Ces instances assureront le suivi de la mise en œuvre des actions.

C’est particulièrement vrai sur les décisions en matière d’urbanisme qui relèvent des communes. Il est primordial de localiser les développements urbains les plus denses, les logements sociaux et les pôles d’emplois autour des axes structurants de transport en commun. Toute incohérence remettrait en cause les investissements réalisés sur les transports en communs.

Mme Jédédoutes :

La cohérence des décisions est en effet essentielle. La concertation est indispensable, mais elle ne doit pas conduire à faire plaisir à tout le monde en introduisant des mesures absurdes qui décrédibilisent la démarche.

Le plan a l’audace de relancer « une réflexion sur la gratuité de l’autoroute A9 entre les échangeurs Nîmes-Ouest et Nîmes-Est. Cette mesure doit permettre un allègement du trafic automobile sur l’avenue Salvador Allende, en cohérence avec la requalification de la voirie ». Imagine-t-on vraiment que l’on va recréer une barrière de péage en pleine voie à chaque échangeur ? Il a fallu plus de 30 ans pour mettre fin à cette absurdité à Montpellier !

Le plan propose également d’étudier « l’aménagement de la bande d’arrêt d’urgence en voie spécialisée partagée », notamment pour le covoiturage. J’imagine que les services de l’Etat vont tomber de leur chaise.

Sans conclure :

L’organisation des déplacements au sein de notre agglomération est un enjeu majeur pour notre vie quotidienne. Nous serons tous conduits à changer nos habitudes dans les années à venir. C’est un sujet sur lequel nous avons tous des opinions, parfois même très radicales.

Alors, pensez-vous que le Plan de Mobilité arrêté nous permette cette transition dans de bonnes conditions ?

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