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La société publique locale, un progrès pour l’action publique ?

Depuis 2010 les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent créer, dans le cadre de leurs compétences, des sociétés publiques locales (SPL). Ce sont des sociétés anonymes à capital 100% public.

Ces sociétés sont compétentes pour réaliser des opérations d'aménagement, de construction ou pour exploiter des services publics à caractère industriel ou commercial, ou toutes autres activités d'intérêt général. Ces sociétés ne peuvent travailler que pour les collectivités qui en sont actionnaires.

La Ville de Nîmes a créé en 2012 une SPL dénommée « Aménagement et Gestion pour l’Avenir du TErritoire », SPL Agate. Aujourd’hui, le capital social d’un montant de 225 000€, est réparti entre la Ville de Nîmes 60.20 %, la Communauté d’agglomération Nîmes métropole à hauteur de 37.40 %,  24 communes sur les 39 de la Communauté d’agglomération à hauteur de 0.10% pour chacune d’elles ainsi que le Syndicat mixte de l’Aéroport Nîmes-Alès-Camargue-Cévennes.

La SPL Agate a connu une croissance très rapide de ses activités depuis sa création. Elle intervient pour des opérations très variées telles que l’opération Hoche Université, le Trambus T2, la requalification du quartier Pissevin, le cadereau d’Uzes, le développement des aménagements aéroportuaires, Magna Porta, la réhabilitation de gymnases ou d’écoles, la gestion de l’office de tourisme, la gestion du stationnement, l’exploitation d’Aquatropic …

Pour :

L’intérêt majeur d’une telle société publique est qu’il permet aux collectivités actionnaires de lui passer des commandes sans mise en concurrence et publicité préalable. Cet outil très polyvalent constitue le prolongement des services de chacune de ces collectivités. Sa souplesse est sa principale qualité. On recrute les personnels en fonction des compétences requises sans avoir à gérer les rigidités des statuts de la fonction publique.  Ce surmesure garantit l’ajustement permanent entre les effectifs et les missions.

Contre :

Le recours à une SPL est un bon moyen de créer de l’opacité sur la gestion de certaines politiques publiques. En effet, aucun élu d’opposition ne siège au conseil d’administration de la SPL Agate. Les recrutements, comme l’attribution des marchés échappent à un véritable contrôle citoyen.  On peut penser que le transfert accéléré de compétences à la SPL va constituer un démembrement des services des collectivités. La société est certes publique, mais sa gestion privée ouvre la porte à de possibles dérives : recrutement d’amis politiques, conflits d’intérêt pour l’attribution de marchés.

Pour :

Une SPL communautaire présente l’énorme avantage de permettre de mutualiser des actions et des compétences au niveau intercommunal. La gestion unifiée des offices de tourisme de Nîmes et de l’agglomération est un facteur d’efficacité incontestable. Une commune qui fait appel à la SPL bénéficie de compétences nourries sur un territoire très étendu.

Un autre avantage est l’étendue des compétences de la société. Elle est capable d’intervenir à toutes les étapes d’un projet, des études préalables, en passant par la concertation, la gestion des autorisations, la réalisation et l’exploitation. Cela garantit la fiabilité des expertises et conseils issues de ses travaux.

Elle propose en effet aux collectivités des contrats adaptés à chaque enjeu : délégation de service public, contrat d’objectifs et de moyens, contrat de prestations de service, concession d’aménagement, mandat de construction, assistance à maîtrise d’ouvrage ...

Contre :

La SPL devient l’homme à tout faire des collectivités de l’agglomération. Quel que soit le sujet, il sera tentant de lui confier son projet. C’est un réel risque démocratique que de voir le débat confisqué par la vision de la direction générale et de quelques élus dominants du conseil d’administration.

Par ailleurs la loi laisse aux collectivités le soin d’organiser les conditions d’exercice d’un contrôle sur la SPL analogue à celui qu’elles exercent sur leurs propres services. Il serait intéressant de voir de quelle manière et avec quels moyens les collectivités actionnaires assurent ce contrôle. Le simple vote annuel du Rapport des représentants des collectivités siégeant au conseil d’administration parait très insuffisant.

Pour :

Il ne faut pas oublier que la qualité première d’une société à capital public est qu’elle ne vise pas à faire des profits. Cela garantit que l’intérêt général sera toujours recherché dans les décisions de son conseil d’administration.

Contre :

L’expérience des sociétés d’économies mixtes montre que la création de tels organismes pose souvent des problèmes de survie au bout d’une vingtaine d’années. Lorsque le nombre de projets confiés diminue ou que les activités vaches à lait s’essoufflent, l’objectif premier des administrateurs devient la préservation de l’outil et des emplois, quitte à lui confier des missions discutables. Espérons que l’on ne recommence pas la même histoire avec les SPL. On peut déjà s’interroger sur l’avenir de la SAT (société d’aménagement du territoire) société d’économie mixte historique de l’agglomération et de la ville de Nîmes. En effet ses compétences sont de fait cannibalisées par la SPL Agate.

Sans conclure :

L’histoire des SPL est encore trop récente pour en faire un véritable bilan. Mais il apparait déjà clairement que ce nouvel outil dans la panoplie des élus ne sera un succès que si trois conditions sont remplies :

1. Le conseil d’administration doit faire une place à l’opposition semblable à celles des assemblées élues.

2. La SPL doit respecter les principes du code des marchés publics pour attribuer ses marchés

3. Les modalités de contrôle de la SPL doivent être explicites et approuvées par toutes les collectivités actionnaires. La fédération des entreprises publiques locales a édité un guide « SPL et contrôle analogue » très utile. Il suggère en particulier de doter la SPL d’un règlement intérieur.

https://www.lesepl.fr/pdf/controle_analogue_guide.pdf